Ma mère
Nous ne nous sommes pas parlé pendant 10 ans. Maintenant, nous sommes des étrangers les uns pour les autres. Depuis que je suis malade, pas une seule fois elle ne s'est informée de ma santé et de plus, certaines données me laissent soupçonner que son irresponsabilité est à l'origine de cette maladie qui menace mon cerveau: elle ne m'a pas emmenée chez le médecin lorsque j'avais 10 ans et que j'ai eu 4 fois de suite les oreillons, et des fièvres à 42º. J'ai du mal à avaler, j'ai du mal à lui dire ce que je pense vraiment d'elle. J'essaye de l'effacer de ma mémoire, laquelle, coup de bol,est censée s'effriter. Mais elle a acheté mon livre, Basque Tanger et elle l'a lu. Elle m'a ensuite envoyé une lettre extremement émouvante et flatteuse, sans parler de ma santé bien sûr, et dans sa lettre de lectrice à un auteur, elle a mis tout l'amour qu'elle n'a jamais su exprimer en tant que mère. Bien sûr je suis très contente que ma mamman me dise que "Aujourd'hui, peu de gens écrivent comme toi.". Mais elle a repris ses comparaisons avec Lautréamont, qui ne me plaisent pas, car je trouve Isidore Ducasse inspiré mais illisible. Son écriture "premier jet" n'a rien à voir avec les 5 ans de travail de Basque Tanger. Mais bon, je dois bien avouer que je suis contente. Quant à mon père, l'habituel silence radio est de mise. Il n'est pas prêt de se pardonner.